
L’indice actions capipondéré est une fantastique invention. Surtout depuis qu’il est possible de le répliquer dans un véhicule d’investissement à bas frais pour en restituer la performance.
Tenez, pour vous exposer aux 1395 valeurs1 de l’indice MSCI World, il vous en coûtera 0,10% par an avec l’ETF le moins cher, UBS ETF (IE) MSCI World UCITS ETF (USD).
Et 0,12% avec Amundi MSCI World UCITS ETF.
Mais, me direz-vous, quand même, la concentration extrême de cet indice sur les valeurs états-uniennes est fort inquiétante, n’est-ce pas ?
Oui, l’indice est très concentré sur les Etats-Unis. Mais il l’a déjà été plus, en 1974.
Pire encore, il y eut même une époque où le Japon était le premier pays, devant les Etats-Unis, comme le montre cette illustration de Goldman Sachs (source).
L’indice capipondéré vous expose à tous les excès, dont celui de la bulle japonaise.
Il vous expose aux stars d’aujourd’hui, à celles de demain, aux daubes d’aujourd’hui, à celles de demain.
Il est d’une plasticité extrême, qui reflète plus ou moins la croissance de l’économie mondiale, avec des périodes d’excès qui s’auto-corrigent.
Et il est très difficile à battre pour les gérants actifs actions monde, comme le montrent les études SPIVA (voir ci-dessous) et Morningstar Active/Passive Barometer.
Voici sa performance en euro selon le site curvo de fin 1978 à fin février 2025 : 10,53% par an en annualisé2.
Evidemment, il y a eu des années de baisse. Et même de forte baisse.
Il a aussi fallu être parfois très patient : entre août 2000 et février 2014, 13 années et 6 mois ont été nécessaires pour repasser au-dessus du précédent plus haut, avec une baisse maximum de 55,7%.
Vive l’arme fatale de l’indice capi-pondéré, diversifié, accessible dans des enveloppes à bas coûts détenues sur le long terme.
J'ai lancé en novembre 2023 un Substack à destination des investisseurs privés, L'Odyssée des Placements. Mon objectif ? Contribuer à améliorer la littératie financière des abonné.e.s.
Le lancement est parrainé par Indexa Capital, qui commercialise en France le contrat d'assurance vie en gestion sous mandat le moins cher (j'en avais parlé ici) : Indexa Vie Spirica. Vous pourrez bénéficier sous conditions d'une remise pendant un an sur les frais d'assurance et de mandat en suivant ce lien.
J’ai lu la semaine dernière un roman magnifique de Raphaël Meltz, Après.
Après, c’est après la mort accidentelle de Lucas, mari de Roxane et père de Sofia et Lorenzo.
Après, donc, Lucas est parmi les siens, qu’il regarde avec une acuité sensorielle qu’il ne connaissait pas de son vivant.
Après, ça dure peu (le titre des chapitres : une minute ; une heure ; une semaine ; un mois ; une année ; leurs vies), le temps pour Lucas de prendre définitivement congé et pour Roxane, Sofia et Lorenzo d’apprendre à vivre sans lui.
Et puis.
Il observe leur vie qui se reconstruit petit à petit, il sait bien que ce n’est qu’une apparence de reconstruction, mais derrière cette façade il y a quelque chose qui se fabrique tout de même, derrière le fait que chaque matin les trois se lèvent, affrontent le présent, acceptent de mettre un pied devant l’autre, derrière cette façade qui pourrait n’être qu’illusion, qui pourrait se lézarder ou même se briser en mille petits morceaux de façade effondrés au sol d’une maison dont le toit menacerait à son tour de s’écraser, rompant définitivement l’idée d’un avenir possible, derrière cette façade-là, parce qu’il les connaît bien, qu’il les ressent bien, il perçoit qu’ils progressent, que ces mois qui passent les modifient, modifient quelque chose de la tristesse en eux ; il y a cette phrase qu’une vieille amie de la famille, qui avait perdu très jeune son petit frère, avait dit à Roxane, au tout début, à propos de la souffrance et du temps qui s’écoule : ça ne passe pas, ça s’espace. Et Lucas voit cela dans leurs gestes, leurs attitudes, leurs silences, leurs rires, leurs larmes : ça ne passe pas, ça s’espace. Et ça s’espacera, de plus en plus. Plus qu’une consolation : eux aussi vont vivre cela.
Ce texte publié par les éditions du Tripode est une merveille d’amour et de pudeur.
Comme le “Grenelle” a beaucoup servi, les puissants du moment ont décidé de plutôt faire un “conclave” pour les retraites. Terme totalement inapproprié, soit dit en passant, quand on réfléchit plus d’une seconde.
Les mots ne veulent plus rien dire.
Moi, pour survivre, je passe plutôt à la médiathèque Françoise Sagan3.
Vous trouvez ce billet trop long ? J’ai fait la synthèse de ce qui suit dans une vidéo de moins de 3 minutes.
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Je suis de plus en plus actif sur mon compte Bluesky, réseau social ressemblant à X/Twitter, en beaucoup plus civilisé.
Bienvenue dans ma semaine Bluesky 12 de 2025.
Mots creux et voeux pieux
L’Union des marchés de capitaux, devenue Union pour l’épargne et l’investissement (UEI) afin de faire semblant de mettre sur le devant de la scène l’investisseur de détail, c’est ce qui doit permettre à l’Union européenne de financer l’économie, les transitions (énergétiques, numériques, que sais-je ?) et maintenant l’effort financier pour réarmer.
Cette UEI “vise à créer un véritable marché unique du financement dans l’UE, effaçant les frontières nationales”, selon les termes de la Banque de France (source).
C’est dire si la communication de la Commission européenne sur sa stratégie à ce sujet était attendue le 19 mars dernier.
Ayant des attentes très mesurées et une conscience aiguë du fait que les mots ne veulent plus rien dire, je n’ai pas été déçu.
Pourtant, à lire les communiqués, c’est un peu le grand soir. Le beurre et l’argent du beurre.
Selon Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne (source),
[l]es ménages auront des possibilités plus nombreuses et plus sûres d'investir sur les marchés des capitaux et d'accroître leur patrimoine. Dans le même temps, les entreprises auront plus facilement accès aux capitaux pour innover, croître et créer des emplois de qualité en Europe.
Des possibilités plus “sûres”, vraiment ?
Figurez-vous (italique ajouté par mes soins) que “les petits épargnants jouent déjà un rôle central dans le financement de l'économie de l'UE au moyen des dépôts bancaires, mais ils doivent avoir la possibilité, s'ils le souhaitent, d'investir une part plus élevée de leur épargne dans des instruments des marchés des capitaux offrant un meilleur rendement, notamment dans la perspective de leur retraite.”
N’est-ce pas déjà le cas ?
Promis, on va lever les obstacles à ce marché unique : “la réduction des inefficacités dues à la fragmentation nécessitera des efforts importants pour supprimer tout obstacle réglementaire ou prudentiel aux activités transfrontières des infrastructures de marché, à la gestion des actifs et à la répartition des fonds.”
Bon, mais concrètement ?
L'UEI vise à accroître la participation des citoyens aux marchés des capitaux en élargissant les options d'investissement et en améliorant la culture financière.
Mais c’est bien sûr : vite, un plan pour améliorer la littératie financière.
La clou de la communication :
La Commission élaborera un schéma directeur européen pour les comptes ou produits d'épargne et d'investissement destinés aux investisseurs de détail sur la base des meilleures pratiques nationales existantes, y compris des recommandations aux États membres sur le traitement fiscal de ces comptes d'investissement.
Ah, ce produit unique que tout le monde appelle de ses voeux4 et dont je ne sais vraiment pas comment il contribuera à augmenter le taux de participation des particuliers aux marchés financiers.
Est-ce que je distingue une allusion à un traitement fiscal préférentiel, à l’heure des déficits abyssaux ?
Le communiqué de presse de la Commission européenne est ici. Une factsheet de 2 pages là. Une page de questions/réponses là.
Le document le plus détaillé sur cette stratégie est là.
Ah, quelques lobbies s’étaient exprimés avant la publication de la stratégie pour l’UEI.
Comme l’AFG, le lobby des sociétés de gestion en France, qui avait communiqué sur sa réponse à la consultation de la Commission sur l’UEI.
Alors que cette dernière est déconnectée des discussions sur la stratégie d’investissement de détail (Retail Investment Strategy), l’AFG n’a pas pu s’empêcher d’y faire référence dans ses préconisations, en alertant sur “[l]es risques d’une approche exclusivement « low cost »”.
L’approche centrée sur le développement de produits « low cost » ne permettra pas de répondre aux objectifs. L’AFG soutient une approche, qui assure diversification, qualité et valeur pour les investisseurs5 et insiste sur la simplification du parcours client.
Pendant ce temps, on continue de débiter les fariboles habituelles sur le financement des entreprises états-uniennes par l’épargne européenne.
Comme celles qu’écrivent Stéphanie Yon-Courtin, qui fut une alliée très efficace de tous les lobbies financiers pour éviter l’interdiction des rétrocessions, et Pascal Canfin, tous les deux députés européens, dans Les Echos (source).
C’est un comble : l’épargne des Européens fuit notre continent pour être placée aux Etats-Unis et financer la croissance des entreprises américaines.
Non ! Quand j’achète des actions d’une société états-unienne, je ne la finance pas. J’achète ces actions à un investisseur qui a décidé de les vendre. L’argent sort de ma poche et va dans la sienne, pas dans les caisses de la société cotée.
Pis encore :
Pendant ce temps, nos startups ne trouvent pas les fonds nécessaires pour innover et sont donc soutenues par… des fonds américains.
Comme s’il y avait une relation de cause à effet ! L’argent qui s’investit dans des actions de sociétés cotées n’est pas celui qui s’investit dans des sociétés non cotées.
Ce n’est pas parce que les ménages de la zone euro ont acheté pour 821 milliards d’euros d’actions cotées de sociétés aux Etats-Unis en 2024 (372 milliards d’euros en 2020) qu’il manque 821 milliards d’euros de financement aux startups européennes.
Pas grave, il faut sonner le tocsin à tout prix, y compris en utilisant des arguments erronés, voire mensongers, afin d’inciter les épargnants européens à plus investir sur les marchés d'actions européens.
Mais rassurez-vous, selon la page questions/réponses de la Commission européenne,
[l]es citoyens jouissent d'une liberté totale d'investir en fonction de leurs choix personnels: ils auront toujours le contrôle total de l'endroit où ils veulent garder et allouer leur argent.
Ouf, ça me rassure.
Investir vs Financer
Il y a une énorme différence entre les deux acceptions du terme “investir”.
Dans la plus commune, “investir” signifie acheter des véhicules de placement (actions, obligations, fonds) permettant de bénéficier du potentiel financier (revenu et/ou plus-value) d’un acteur ou d’un secteur.
Dans l’autre, “investir” est synonyme de financer : schématiquement en prêtant de l’argent à un acteur (en achetant des obligations lors de leur émission) ou en renforçant ses fonds propres lors d’une augmentation de capital.
L’agression de l’Ukraine par la Russie, qui avait démarré par l’annexion illégale de la Crimée en 2014 puis par la deuxième invasion le 24 février 2022, et l’alignement à peu près intégral de l’Administration Trump sur la Russie de Poutine, ont conduit les Européens à une inéluctable conclusion : ils devront dorénavant se débrouiller sans les Etats-Unis en matière de défense.
Et se réarmer.
Ce qui requiert des investissements considérables.
Reprenons nos deux acceptions du terme.
Pour la première, les fournisseurs d’ETF de niche ont été prompts à créer des produits permettant de s’exposer à des valeurs de défense européennes.
Comme WisdomTree Europe Defence UCITS ETF, lancé le 4 mars, qui avait déjà plus de 472 millions d’euros d’encours au 21 mars.
L’indice répliqué (WisdomTree Europe Defence UCITS Index) est très concentré : au 21 mars, les deux premières positions (Rheinmettal et Leonardo) pesaient près de 36% du total.
HANetf a également annoncé travailler sur le lancement d’un produit similaire. Cet émetteur avait lancé en juillet 2023 Future of Defence UCITS ETF (0,49% de frais annuels et 1,862 milliard de $ d’encours au 28 février 2025), un produit exposé à des valeurs liées à la défense du monde entier.
Pour la deuxième acception, c’est plus compliqué.
Eric Lombard, le ministre de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a annoncé la semaine dernière la création par Bpifrance du fonds Bpifrance Défense, réservé aux particuliers et consacré à la défense et à la cybersécurité.
Peu de détails pour le moment, mais un communiqué de Bpifrance apporte quelques précisions intéressantes sur le financement (au sens strict du terme) du secteur de la défense en France.
On y apprend que
[d]epuis 2021, Bpifrance (hors Assurance Export) a dépassé le seuil du milliard d'euros apportés chaque année aux entreprises du secteur.
Les véhicules d’investissement existants (en fonds propres ou en dette)6 sont principalement abondés par Bpi France et des investisseurs institutionnels.
Quant au futur fonds destiné aux particuliers, voici ce qu’en dit le communiqué de Bpifrance :
Le prochain fonds de la gamme « Bpifrance Entreprises » à destination des particuliers, "Bpifrance Défense", permettra à ceux qui le souhaitent d’investir dans des entreprises non cotées dont l’activité sert les enjeux liés à la souveraineté nationale avec une ambition accrue pour le secteur de la défense. D’une taille cible de 450M€, ce fonds sera accessible aux particuliers à partir d’un ticket minimum de 500€.
Attendons les détails7. Je suppose (et j’espère) que ce fonds sera éligible au PEA.
Incidemment, il a fallu 3 semaines à l’ETF de WisdomTree pour peser 472 millions d’euros d’encours, combien de temps faudra-t-il à Bpifrance Défense pour lever 450 millions d’euros ?
Naufrage
SPIVA, c’est l’acronyme de Standard & Poor’s Indices vs Active.
Cette étude réalisée depuis 2002 par Standard & Poor’s DJ Indices, l’un des trois membres de l’oligopole de la fourniture d’indices avec FTSE Russell et MSCI, compare la performance collective des fonds gérés activement à celle de l’indice S&P DJ représentatif de leur catégorie, ou de leur famille de catégories.
Pour différentes régions du monde (fonds domiciliés en Australie, au Canada, aux Etats-Unis, en Europe, au Japon, etc.) et sur différentes durées (de un à vingt ans), SPIVA calcule au sein des catégories le pourcentage de fonds gérés activement ayant survécu sur la totalité de la période analysée et ayant fait moins bien que l’indice de référence.
Le calcul se fait sur la performance ainsi que sur la performance ajustée du risque.
Semestre après semestre depuis plus de 20 ans, la conclusion est toujours la même : sur à peu près toutes les durées supérieures à 3 ans, la team gestion active échoue collectivement à battre les indices.
La grosse limite méthodologique de SPIVA, c’est que la team gestion active est comparée à des indices, alors que les indices sont des fictions non investissables. Pour s’y exposer, il faut investir dans des véhicules indiciels, qui, comme les fonds gérés activement, facturent des frais.
SPIVA surestime donc structurellement l’échec collectif de la team gestion active.
C’est pour cela que je préfère l’étude Morningstar Active/Passive Barometer, qui compare la team gestion active à la team gestion indicielle.
J’ai présenté ici les résultats à fin 2024 du Baromètre Morningstar pour les fonds domiciliés en Europe.
Ils étaient calamiteux pour la team gestion active.
J’ai présenté là les résultats à fin 2024 de SPIVA pour les fonds domiciliés aux Etats-Unis.
Ils étaient calamiteux pour la team gestion active.
Voici les résultats à fin 2024 de SPIVA pour les fonds domiciliés en Europe.
Ils sont calamiteux pour la team gestion active.
Commençons par la performance seule.
Grille de lecture : 91,9% des fonds actions Europe ont délivré une performance sur 5 ans inférieure à celle de l’indice S&P Eurozone BMI. La bonne nouvelle, c’est que 8,1% des fonds de l’univers de départ ont fait mieux que l’indice.
Qui a su les identifier à l’avance ? Ces champions étaient-ils référencés dans votre contrat d’assurance vie favori ?
Regardez les pourcentages sur 10 ans : ils sont épouvantables.
Continuons avec la performance ajustée du risque. Il n’y a pas de données sur un an.
Grille de lecture : 95,1% des fonds actions Europe ont délivré une performance ajustée du risque sur 5 ans inférieure à celle de l’indice S&P Eurozone BMI.
Regardez les pourcentages sur 10 ans : ils sont calamiteux.
Nous allons maintenant faire une minute de silence pour les clients des vendeurs rétrocommissionnés de produits gérés activement.
30 secondes pour toute la sous-performance passée.
Et 30 secondes pour ce qui les attend avec la version démocrrratisée de fonds investissant dans des actifs non cotés, dont ils ont actuellement un avant-goût sur le marché des SCPI.
Bien entendu, sur toutes les périodes et dans toutes les catégories, il y a toujours des fonds gérés activement qui survivent et font mieux que les fonds indiciels de leur catégorie.
La question importante pour les distributeurs rétrocommissionnés de produits de placement est la suivante : savez-vous les identifier à l’avance avec un degré de fiabilité élevé ?
Si ça n’est pas le cas, faites de l’indiciel.
Si c’est le cas, j’aimerais tellement que vous partagiez votre recette avec les lecteurs de ce blog en utilisant le forum. Pour le moment, personne n’a voulu partager sa recette.
Destruction de richesse
Le terme de “création de richesse”8 m’a toujours hérissé.
En revanche, j’avoue que le terme de “destruction de richesse” me fait presque jubiler.
Les marchés boursiers ont jusqu’à ce jour délivré des performances nettes d’inflation positives sur longue durée (j’ai parlé ici de la dernière édition d’un rapport annuel d’UBS, Global Investment Returns Yearbook, qui se penche sur 125 ans de données de performance).
En d’autres termes, la marée des marchés actions a monté, reflétant la croissance de long terme de l’économie. Un gérant exposé aux marchés actions ne “crée” à proprement parler aucune richesse : il bénéficie mécaniquement de la marée montante.
En revanche, certains gérants et certaines sociétés de gestion détruisent de la valeur.
Soit parce qu’ils sont très mauvais (auquel cas ils finissent par disparaître) ; soit parce qu’ils proposent des produits activant les zones de l’appât du gain dans le cerveau primitif de certains investisseurs ; soit parce qu’ils sont mauvais et proposent de tels produits.
Aux Etats-Unis, Morningstar établit deux palmarès sur 10 ans : celui de la création de richesse et celui de la destruction de richesse. Au niveau des fonds et au niveau des sociétés de gestion.
J’avais parlé ici du palmarès de la création de richesse.
J’écrivais ceci :
[A]u niveau des sociétés de gestion, c’est évidemment Vanguard qui domine, avec une création de richesse totale de 4700 milliards de dollars. En se “contentant” de permettre aux investisseurs de s’exposer de façon indicielle à l’évolution des marchés actions.
Le pendant de Vanguard côté destruction de richesse est ARK Invest.
ARK Invest, c’est une société de gestion créée par Cathie Wood en 2014.
Cathie Wood accéda au statut d'oracle de l'innovation disruptive grâce aux performances époustouflantes de tous les ETF gérés activement par la société de gestion Ark Invest en 2020 : +152% pour le vaisseau-amiral de la gamme, ARK Innovation ETF (ARKK).
Ces performances et l’omniprésence médiatique de Wood ont activé les zones de la spéculation dans les cerveaux de nombreux investisseurs/spéculateurs, qui ont massivement acheté les produits d’ARK Invest après leur forte hausse.
Laquelle forte hausse fut suivie par des performances calamiteuses en 2021 et 2022.
Comme d'habitude, le gros des achats est fait après les performances époustouflantes de 2020 qui n'ont bénéficié qu'à peu d'investisseurs représentant des encours faibles, alors que les énormes baisses de 2021 et 2022 ont impacté des encours très élevés.
D'où la débâcle collective des investisseurs.
ARK Innnovation ETF (ARKK) se classe troisième dans le palmarès des 15 fonds ayant le plus détruit de valeur aux Etats-Unis sur 10 ans à fin 2024, avec 7 milliards de $ incinérés.
Et ce alors que la performance d’ARKK sur cette période a été positive : ce sont bien les investisseurs qui ont été les responsables de leurs énormes moins-values9 en achetant et vendant aux pires moments.
On notera la présence d’un autre ETF ARK Invest en cinquième position, celui consacré à la génomique (5 milliards de $ incinérés).
ProShares, champion des produits ultra-spéculatifs, place cinq de ses armes d’auto-destruction massive dans le top 15.
ARK Invest écrase l’anti-palmarès des sociétés de gestion : 13,36 milliards de $ incinérés, très loin devant les 6,66 milliards de $ incinérés par les produits de Kraneshares.
Ah, ce sont les produits actions inversés qui remportent le palmarès des catégories, avec 44,95 milliards de $ partis en fumée. Je rappelle que ces produits visent à délivrer l’inverse de la performance d’un actif (indice ou action).
Manifestement, les spéculateurs qui s’y exposent les utilisent en dépit du bon sens.
Pour le moment, les investisseurs en Europe n’ont pas succombé à la magie Cathie Wood.
Ils ont la chance de pouvoir investir depuis avril 2024 dans 3 ETF ARK Invest : ARKK, ARKG (ARK Genomic Revolution Ucits ETF qui, comme ARKK, existe déjà aux Etats-Unis) et un produit créé pour le marché européen, ARKI (ARK Artificial Intelligence & Robotics Ucits ETF).
Frais annuels ? 0,75%, comme les produits états-uniens.
Les encours au 20 mars ?
ARKK : 38 434 078 $.
ARKG : 8 524 459 $
ARKI : 52 048 527 $
L’intelligence artificielle et la robotique séduisent plus que l’innovation et la génomique. Il faut dire que ARKI a connu un début de vie très faste, jusqu’à la correction de début 2025.
Ces trois fonds ne sont pas enregistrés en France.
Des nouvelles du #H2Ogate
Avertissement : j'ai assisté entre novembre 2022 et avril 2023 l'Association Collectif Porteurs H2O dans le cadre d'une mission rémunérée (détails ici). A vous de déterminer si elle influe sur ma couverture de l'affaire H2O AM sur ce blog.
Lars Windhorst, l’entrepreneur spécialiste du non-remboursement de ses dettes qui a convaincu sur son track record impeccable et via de multiples cadeaux10 les dirigeants de H2O AM d’investir dans la dette et les actions de plusieurs sociétés contrôlées par lui plus de 2 milliards d’euros, Lars Windhorst donc a vraiment beaucoup de mal à produire les comptes 2022 et 2023 de WildBunch, une société cotée allemande.
Wild Bunch, c’est un peu le running gag de ce blog : la publication des comptes 2022 et 2023 est sans arrêt repoussée. Aux dernières nouvelles, celle des comptes 2022 devait avoir eu lieu le 21 mars.
Le 23 mars 2025 à 16 heures, il n’y en avait aucune trace sur le site de la société.
Puis on apprenait le 24 mars que les comptes 2022 seraient publiés le 26 mars et ceux de 2023 le 31 mars.
Sacré Lars.
Comment Bruno Crastes et Vincent Chailley, qui sont toujours chez H2O AM, ont-ils pu investir plus de 2 milliards d’euros dans la dette et les actions de sociétés d’un individu qui a pour habitude bien établie de ne pas toujours rembourser ses dettes et de publier avec retard des comptes non validés par un commissaire aux comptes ?
Depuis la scission des 7 fonds sinistrés de H2O AM, il est très difficile de reconstituer la performance des « vieux » fonds d’avant la scission.
Je me livre à l’exercice en calculant une valeur liquidative reconstituée, égale à la somme de la valeur liquidative des « nouveaux » fonds liquides (FCP à la fin du nom) et de la valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets.
Cette valeur liquidative reconstituée est une fiction, car aucune transaction n’est possible sur les side-pockets.
Mais elle permet de voir où en sont les porteurs de parts. Notamment par rapport au plus-haut historique atteint par les « vieux » fonds avant qu’ils ne heurtent des icebergs et fassent naufrage en février et mars 2020.
Autre limite de l’exercice : rien ne dit que les porteurs de parts récupèreront l’équivalent de la dernière valeur liquidative estimative des side-pockets. On ne le saura que quand toutes les participations illiquides auront été revendues au seul acheteur, Tennor, la holding de Lars Windhorst.
Ou plus exactement au fur et à mesure du remboursement par Tennor de la « first super senior secured note » (FSSSN) émise par Tennor, portant intérêt au taux annuel de 4,5% et prévoyant la possibilité de remboursements intermédiaires. Je rappelle (j’en avais parlé ici) que le remboursement total était initialement prévu début 2022. Les créanciers de Tennor, pour éviter la mise en liquidation de la société imposée par un tribunal néerlandais, ont consenti un délai supplémentaire de 6 mois (soit un remboursement début juillet 2022).
Je rappelle aussi que, comme de bien entendu, il n'y a eu aucun remboursement entre juillet et décembre 2022 de la part de Tennor.
Début janvier 2023, H2O AM a laissé entendre dans un communiqué sybillin que Tennor avait procédé fin 2022 à un premier remboursement partiel susceptible de permettre de diminuer le nominal de la FSSSN de 250 millions d'euros.
En fait de 250 millions, ce sont 143,752 millions qui ont été remboursés d'après mes calculs.
Par ailleurs, un porte-parole de Tennor avait déclaré début janvier au quotidien régional allemand Westfallen-Blatt que la holding de Lars Windhorst avait procédé en 2022 à plusieurs remboursements partiels de la FSSSN, dont un fin 2022 pour solde de tout compte.
Après avoir cessé pendant des mois de mettre à jour la valeur estimative mensuelle de side-pockets, bloquée à fin février 2023, H2O AM a dû se résoudre le 12 septembre 2023 à la baisser pour les 7 fonds.
Puis de nouveau en octobre pour les valeurs estimatives à fin septembre. Puis de nouveau en décembre pour les valeurs estimatives à fin novembre.
En janvier 2024, coup de théâtre : la valorisation estimative à fin décembre 2023 est en hausse.
H2O AM, généralement mutique, publiait le 26 janvier 2024 un communiqué de presse pour annoncer « un nouveau remboursement dans les prochaines semaines ».
Remboursement « de l’ordre de 70 millions d’euros ».
Puis nouveau coup de bambou sur les valorisations à fin janvier 2024, en baisse de 109 millions d'euros (voir ci-dessus), avant même que les 70 millions d'euros annoncés aient été remboursés aux porteurs de parts.
Les 20, 21 et 22 mars 2024 arrivait le remboursement annoncé : H2O AM avait retenu la leçon de sa désastreuse communication sur le premier remboursement et avait choisi d'annoncer un montant inférieur au montant réel, qui est de 85 millions d'euros (voir tableau ci-dessous).
Le 7 août 2024, après la publication du rapport accablant de la FCA (le régulateur britannique) détaillant les nombreux mensonges et manquements de H2O AM, la société de gestion indiquait qu’elle avait “sécurisé” 250 millions d’euros pour rembourser les porteurs de parts.
Sans respecter l’égalité de ces derniers, puisqu’il était indiqué que les porteurs qui “[renonceraient] à toute action contre le Groupe H2O AM et les tierces parties en relation à ces investissements et à leur gestion” bénéficieraient “d’un paiement accéléré et majoré “.
Les autres devront attendre jusqu’à six ans pour être remboursés partiellement.
Entre la valorisation initiale d’octobre 2020 et celle de fin janvier 2025, compte tenu des remboursements de janvier 2023 et mars 2024, la moins-value latente sur les 7 side-pockets est de près de 1 milliard 319 millions d’euros d’après mes calculs.
La valeur résiduelle des side-pockets à fin février 2025 est estimée à un peu plus de 94 millions d'euros.
Si H2O AM rembourse 250 millions d’euros et s'il n'y a pas d’autre remboursement, la perte totale pour les porteurs de parts de side-pockets pourrait donc être de 1 milliard 163 millions d'euros.
Le taux de recouvrement par rapport à la valorisation initiale des side-pockets serait de 29% (remboursement total de 479 124 121 €/1 642 330 150 €).
C'est le casse du siècle.
Pour les fonds liquides, voilà où on en est au 20 mars 2025 (date de la VL des fonds liquides dont le nom se termine par « FCP », la dernière valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets étant en date du 28 février 2025).
J'ai ajouté à la VL reconstituée le montant des distributions de janvier 2023 et de mars 2024.
En matière de décollecte, voilà où on en était au 20 mars 2025.
En matière de performance, voilà où on en est au 20 mars.
Les produits dont il a été question dans ma semaine Bluesky 12 peuvent être achetés en priorité chez votre libraire (pour les livres).
Sinon, si vous n’avez vraiment pas accès à un libraire, ou pour les livres en anglais, parfois plus difficiles à se procurer en librairie en France, vous pouvez cliquer sur les liens disséminés dans ce billet (informations sur le programme d’affiliation Amazon ici).
Vous pouvez suivre mon compte Bluesky ici, le compte X d’Alpha Beta Blog là et mon compte X en anglais là.
Je ne suis pas habilité à donner des conseils sur les produits de placement : ne me sollicitez pas pour cela car je ne vous répondrai pas.
Si vous avez des questions, consultez un conseiller en investissement financier. Un conseiller en investissement financier, c’est quelqu’un que vous payez pour qu’il.elle vous donne des conseils. Dans le jargon de MIF 2, seul le conseiller exclusivement payé par ses clients peut se déclarer indépendant.
Quelqu’un qui est payé par les fournisseurs de produits pour vous vendre lesdits produits, c’est un vendeur, pas un conseiller.
Comment trouver un conseiller en investissements financiers (CIF) indépendant au sens de MIF 2 ? C'est à peu près mission impossible : le site de l'ORIAS, qui est l'organisme auprès duquel s'enregistrent les CIF, ne permet pas de rechercher selon les critères "indépendant" ou "non-indépendant". Pas plus que ne le permettent les sites des 4 associations de CIF agréées par l'AMF.
C'est affligeant et scandaleux.
La charte éditoriale d’Alpha Beta Blog est consultable ici.
C’était ma semaine Bluesky 12 de 2025. Sayōnara. さようなら.
A fin février 2025.
Aucun investisseur n’a obtenu cette performance : un indice est une fiction non investissable. Pour s’y exposer, il faut investir dans un véhicule indiciel qui le réplique. Ce véhicule facture des frais qui viennent en déduction de la performance revenant à l’investisseur.
Que l’on trouve au 8 rue Léon Schwartzenberg, à Paris, 10ème arrondissement.
En fait, à peu près personne.
Le sous-texte : “pas touche à la marge des sociétés de gestion”.
Definvest, lancé en 2018 par la DGA et Bpifrance ; le Fonds Innovation Défense (FID), lancé en 2021 par l’Agence de l’innovation de défense (AID) et Bpifrance,
Ou de “valeur”.
Réalisées et latentes.
Détails dans la stupéfiante “final notice” de la FCA, dans laquelle tout est vrai puisque ce document relate les termes d’un accord entre le régulateur britannique et H2O AM, et dans l’exceptionnel article du Financial Times intitulé “The ballad of Lars and Bruno”.
;) Bourse : faut-il croire au retour de la gestion active ? : https://lesechos.fr/patrimoine/placement/bourse-faut-il-croire-au-retour-de-la-gestion-active-2156508 via @LesEchos
Les excès évoqués par notre hôte sont, si j'ai bien compris, les épisodes de valorisation excessive de pans du marché qui se traduisent, pour les indices capipondérés, par une surexposition.
Pour dire que quelque chose est survalorisé, je crois qu'on se réfère au P/E qui reflète la valeur attendue des revenus futurs.
Considérant les niveaux atteints par les P/E américains, et en particulier des M7, à la faveur du mouvement haussier 2023-2024, nombre de commentateurs américains ont commencé à parler d'indices équipondérés comme une alternative prudente aux indices capipondérés.
Et maintenant (depuis quelques mois) les mêmes évoquent la diversification hors US comme une attitude pertinente.
Oui, les excès s'auto-corrigent, et la gestion active ne fait souvent pas mieux qu'un indice très large.
En particulier si l'exceptionnalisme américain a toujours cours.
Si ce n'est plus le cas, le manque de réactivité des intermédiaires français (par exemple par rapport à leurs homolgues allemands) pourrait (encore) porter préjudice aux épargnants français, qui n'ont pas accès aux bons ETF (pourtant UCITS) en raison de politiques commerciales qui les désavantagent.