Ma Semaine Twitter 26 de 2024
Mettre un tigre thématique dans un moteur diversifié, pour avoir le pire des deux mondes
En 1933, Sir John Templeton écrivit ces précieuses pensées :
The investor who says, 'This time is different', when in fact it's virtually a repeat of an earlier situation, has uttered amount the four most costly words in the annals of investing.
A savoir :
L’investisseur qui dit, “Cette fois, c’est différent”, alors qu’il s’agit en fait de la répétition d’une situation antérieure, prononce les quatre mots les plus coûteux dans les annales de l’investissement.
Mais voilà, l’investisseur se repaît d’histoires.
Et comme les paroles de John Templeton sont devenues très connues et reviennent hanter les évangélistes qui les prononcent (“Avec internet, cette fois, c’est différent”, ou “Avec l’IA, cette fois, c’est différent”), il devient difficile de répéter “Cette fois, c’est différent”.
Alors on trouve une autre tournure pour dire la même chose sans dire la même chose.
Par exemple en utilisant un mot savant : paradigme.
“Cette fois, c’est différent” devient : “Nous faisons face à un nouveau paradigme”.
Selon l’excellent site du Centre national de ressources textuelles et lexicales, un paradigme est une
[c]onception théorique dominante ayant cours à une certaine époque dans une communauté scientifique donnée, qui fonde les types d'explication envisageables, et les types de faits à découvrir dans une science donnée.
Les gérants actifs voient de nouveaux paradigmes partout, ce qui leur permet de prêcher pour leur paroisse, sérieusement attaquée par la gestion indicielle à bas coûts.
C’est le cas de Sandro Pierri, qui dirige depuis juillet 2021 BNP Paribas Asset Management.
Dans un entretien avec Caroline Mignon des Echos paru le 25 juin, il déclare que
le nouveau cycle est propice à la gestion active ; à long terme, tout indique qu’elle soit1 extrêmement efficace pour naviguer sur les marchés.
“Tout” ? C’est quoi, tout ? On n’en saura pas plus. Il suffit d’affirmer et la réalité se pliera aux desiderata des gérants actifs. Magie du verbe.
Selon Caroline Mignon, Sandro Pierri
justifie son propos par le changement de paradigme de l’économie mondiale, après quarante ans de mondialisation et de faibles taux d’intérêt.
Entre deux paradigmes s’ouvre une période de transition, prétexte pour énoncer une vérité bouleversante :
Comme dans toute transition, il va y avoir des gagnants et des perdants, il faudra avoir des convictions fortes.
Ma conviction forte à moi ?
Un fonds indiciel vous donne accès aux perdants comme aux gagnants. Il n’est pas nécessaire d’avoir des convictions fortes.
Comme le disait Jack Bogle, le fondateur de Vanguard :
Ne cherchez pas l’aiguille dans la meule de foin, achetez simplement la meule de foin.
Cette fois, c’est différent est le titre d’un livre de Carmen Reinhart et Kenneth Rogoff, qui expliquent que rien n’est jamais différent en s’appuyant sur huit siècles de spéculation financière.
Si vous voulez creuser le concept de paradigme scientifique, lisez La structure des révolutions scientifiques de Thomas Kuhn (1922-1996).
J'ai lancé en novembre 2023 un Substack à destination des investisseurs privés, L'Odyssée des Placements. Mon objectif ? Contribuer à améliorer la littératie financière des abonné.e.s.
Le lancement est parrainé par Indexa Capital, qui commercialise en France le contrat d'assurance vie en gestion sous mandat le moins cher (j'en avais parlé ici) : Indexa Vie Spirica. Vous pourrez bénéficier sous conditions d'une remise pendant un an sur les frais d'assurance et de mandat en suivant ce lien.
J’ai voté2 dimanche dernier. Je voterai de nouveau dimanche prochain3.
J’ai découvert Hélène Frappat en début d’année en lisant un remarquable essai, Trois femmes disparaissent. Ces trois femmes sont trois actrices : Tippi Hedren, sa fille Melanie Griffith, et la fille de Melanie Griffith, Dakota Johnson. Trois femmes qui ont toutes été maltraitées par l’industrie cinématographique.
La semaine dernière, j’ai terminé un autre livre d’Héléne Frappat, tout aussi remarquable : Le gaslighting ou l'art de faire taire les femmes.
Gaslighting est un terme qui a été forgé à partir du film de George Cukor, Gaslight (Hantise en français), dans lequel Gregory (Charles Boyer), le nouveau mari d’Alice (Ingrid Bergman), manipule sa femme pour la convaincre qu’elle est folle. Il a auparavant assassiné la tante d’Alice dont il convoitait les bijoux, et a épousé la nièce pour mettre la main sur ces bijoux qui l’obsèdent.
Ce terme — qu’Hélène Frappat propose de traduire par “évaporation” — désignait donc à l’origine une relation conjugale reposant sur la manipulation d’une femme par son époux, avant de devenir un mot-clé de la psychologie étatsunienne, puis un outil critique du féminisme.
Plus récemment, le terme gaslighting définit un type de langage politique mensonger et la violence qui en découle.
Dans son livre, Hélène Frappat cherche à le définir philosophiquement en utilisant le regard de la cinéphilie et les outils du féminisme. C’est passionnant.
Chez nous, c’est ma femme qui sait décrypter les notices IKEA.
Prise de hauteur pendant quelques jours (et donc retard dans la publication de cette semaine Twitter) : pas de Vexin, des sommets alpins. Je ne connais rien de mieux que la marche en montagne pour se vider l’esprit. C’est aussi efficace que le jardinage.
Chamonix, donc. Même quand il ne fait pas beau, c’est bien.
Bienvenue dans ma semaine Twitter 26 de 2024.
J’voudrais bien, mais j’peux point
S’il est une histoire d’amour contrariée, c’est bien celle entre les épargnants français et la bourse.
Les moins de 50 ans n'auront peut-être pas la ref (comme on dit chez les jeunes) du titre de cette vignette.
La voici donc.
C'est tiré de l'immortelle chanson La bonne du curé (paroles de Charles Level, Tony Montoya et Tony Roval), chantée ici par la non moins immortelle4 Annie Cordy (1928-2020).
Ecoutez avec attention, c'est bien plus subtil et engagé que ce qu'une écoute hâtive pourrait laisser croire.
J’voudrais bien investir en bourse, mais j’peux point.
Pour plein de (mauvaises) raisons qu’un sondage réalisé par OpinionWay pour BlackRock nous rappelle (ce sont en effet toujours les mêmes).
Principaux enseignements de ce énième sondage qui ne sert pas à grand chose.
71% des sondés reconnaissent l’importance de l’épargne pour leur sécurité financière. Tant pis si le terme de “sécurité financière”, qui prend aussi parfois la forme de “sérénité financière”, n’est pas précis.
68% des sondés déclarent avoir déjà investi ou être prêts à le faire. Voici typiquement un amalgame sans intérêt. Il ne coûte rien de se déclarer “prêt” à investir : seuls 48% des sondés déclarent avoir déjà investi.
Les questions relatives à ce que BlackRock appelle “les freins psychologiques à l’investissement” sont un peu plus intéressantes : 82% des sondés évoquent la complexité des produits financiers et 77% le sentiment de ne pas bien comprendre les mécanismes de la finance.
83% des sondés déclarent qu’ils seraient plus enclins à investir à travers des solutions plus faciles à comprendre et 71% par un investissement accessible en ligne.
Beaucoup plus intéressantes, les questions relatives à la facilité pour atteindre la sérénité financière : gérer les dépenses, c’est plus facile que difficile ; c’est l’inverse pour l’épargne et surtout pour l’investissement.
Investir pour placer son argent n’est jugé facile que par 38% des sondés et difficile par 60% d’entre eux.
Une des limites des sondages, c’est que les réponses proposées sont choisies par le commanditaire du sondage, reflètent ses biais et pas nécessairement toutes les opinions des sondés et sont au service d’un agenda.
Dans les réponses à la question sur les caractéristiques d’un bon investisseur, l’appétence très forte pour la sécurité apparaît clairement : 54% des sondés estiment qu’un bon investisseur privilégie la sécurité et la stabilité des investissements, ce qui est bien entendu incompatible avec une performance de long terme élevée.
En revanche, du côté positif, ils sont 50% à déclarer qu’un bon investisseur investit régulièrement, même de petites sommes.
Du même côté positif, la faible adhésion aux réponses considérant l’investissement comme une activité spéculative : seulement 18% des sondés estiment qu’un bon investisseur exploite toutes les opportunités de court terme des marchés et 9% qu’il prend beaucoup de risques sur un seul coup.
La réponse de la plus significative de l’immense déconnexion entre la perception et la réalité actuelle, c’est celle à la question sur la somme minimum nécessaire pour investir : 8721 euros en moyenne !
Pour les femmes, qui représentaient 52% de l’échantillon, la somme moyenne s’élève à 9211 euros, contre 8206 euros pour les hommes. Pour les investisseurs parmi les sondés, elle s’élève à 9012 euros, contre 8576 euros pour les non-investisseurs.
Il y a encore du travail pour transformer la start-up nation en nation d’investisseurs.
L’aveugle et le paralytique
Ce n’est pas le titre d’une fable de La Fontaine. Mais c’est bien le titre d’une fable. Son auteur ? Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794).
Dans une ville de l'Asie
Il existait deux malheureux,
L'un perclus, l'autre aveugle, et pauvres tous les deux.
Ils demandaient au Ciel de terminer leur vie ;
Mais leurs cris étaient superflus,
Ils ne pouvaient mourir.
A la fin, l’aveugle et le paralytique firent alliance.
Je marcherai pour vous, vous y verrez pour moi.
Si vous voulez lire la fable tout entière, elle est ici.
Les fonds diversifiés, à savoir des fonds pouvant s’exposer à la fois à des obligations et à des actions dans des proportions fixes ou variables, eurent pendant quelque temps le vent en poupe, en raison notamment d’éphémères performances relatives correctes de quelques fonds flexibles chanceux.
Puis les vents tournèrent5 et l’on s’aperçut que le roi n’était pas très habillé : performances médiocrissimes de la quasi totalité des fonds flexibles et des fonds diversifiés profilés (prudents, équilibrés et dynamiques).
D’où un désamour : selon Morningstar, les fonds d’allocation avaient enregistré une décollecte sur 12 mois de 90 milliards d’euros en Europe à fin avril 2024.
Comment raviver la flamme ?
Mais c’est bien sûr : et si on mettait des thématiques dans le moteur actions ?
Comme la réclame pour Esso qui a débuté en France en 1965, l’année de ma naissance, et qui illustre cette semaine Twitter.
C’est la brillante idée qu’ont eue quelques sociétés de gestion dont nous parle Aurélie Fardeau dans Les Echos.
Je me prends à rêver d’une improbable dream team dans un fonds flexible : les prouesses de Carmignac Gestion en matière d’anticipation des grands phénomènes macroéconomiques et celles de Cathie Wood en matière de choix des valeurs de l’innovation disruptive.
Je pense que les fonds flexibles sont à fuir comme la peste et que la plupart des fonds profilés ne valent guère mieux (il n’y a pas de gestion et cette non-gestion est facturée bien trop cher).
Si, un soir, au fond d’un bois ou dans mon contrat d’assurance vie, je tombais sur un fonds diversifié avec un tigre thématique dans son moteur, je prendrais mes jambes à mon cou6.
Le clairon
L’Afer est un énorme paquebot qui coule lentement. En pointe à sa création en 1977, le contrat d’assurance vie de l’association aux 760 000 adhérents7 a été ringardisé au fil du temps par des concurrents bien plus agiles.
J’avais parlé ici de ce lent naufrage.
L’assemblée générale de l’Afer s’est tenue le 25 juin et les résolutions présentées par la direction ont été votées.
Le communiqué de presse qui a suivi cette assemblée générale est un grand moment.
Le Président de l’Association a rappelé que le moment était venu de proposer un contrat complémentaire où « l’un ne sera pas contre l’autre mais à côté », pour tous les épargnants prêts à s’engager dans le temps.
Le nouveau contrat dont le principe a été voté ne “sera pas contre l’autre mais à côté”. Je suis fort impatient de voir à quoi il va ressembler.
J’ai été soulagé de lire que
les adhérents au multisupport existant seront libres d’accéder ou non à ce nouveau contrat. De la même manière les nouveaux adhérents pourront choisir d’accéder à tous les contrats.
L’Afer, c’est la liberté !
Le plus grand moment de ce communiqué de presse, c’est le ton, qui me rappelle un individu qui fut fort célèbre en son temps et qui est totalement oublié aujourd’hui : Paul Déroulède (1846-1914).
Déroulède fut fameux notamment pour un poème guerrier, Le Clairon, qui commence ainsi :
L’air est pur, la route est large,
Le clairon sonne la charge,
Les zouaves vont chantant,
Et là-haut sur la colline,
Dans la forêt qui domine
Le Prussien les attend.
Et ça se termine mal pour le clairon, évidemment.
Puis, dans la forêt pressée,
Voyant la charge lancée
Et les zouaves bondir,
Alors le clairon s’arrête :
Sa dernière tâche est faite,
Il achève de mourir.
En 2024, c’est un nouveau type de combat que l’on mène (italique ajouté par mes soins sur le moment Déroulède).
L’Afer a […] réaffirmé que dans le nouveau contexte politique, il faudra compter avec elle afin de poursuivre le combat pour la défense des épargnants et pour la stabilité du statut juridique, fiscal et social de l’assurance vie.
En 2024, l’ennemi, ce n’est plus le Prussien, c’est la taxation de ce trésor national qu’est l’assurance vie.
L’Afer fera entendre sa voix pour rappeler avec force que l’assurance vie est au service à la fois des épargnants français et de l’économie française. 45% de la dette publique domestique est financée par l’assurance vie. « On ne taxe pas l’assurance vie, notre trésor national qui contribue à plus du quart du financement en actions de l’économie française ». Et le Président de l’Association de rappeler « nous n’avons pas de fonds de pension mais les Français sont intelligents : ils ont une assurance vie »
Ce trésor national contribue à plus du quart du financement en actions de l’économie française. Est-ce que quelqu’un peut expliquer au président de l’Afer qu’acheter et vendre des actions sur le marché secondaire ne contribue en rien au financement de l’économie française ?
Le naufrage continue.
J’ai fort heureusement trouvé bien mieux que le contrat Afer pour mes besoins d’assurance vie8 (voir ci-dessus).
Dialogue
Les vendeurs à découvert, en France, sont honnis par la quasi totalité des establishments politique et des affaires.
A une époque où le dialogue n’existe plus, remplacé par les monologues et les invectives, Paris Europlace vient de publier son guide du dialogue actionnarial.
Lequel ne s’adresse pas aux vendeurs à découvert, qui ne sont pas des actionnaires de l’entreprise visée, mais concerne notamment les investisseurs activistes qui sont actionnaires et exigent des changements de la part de l’entreprise.
Pourquoi un tel guide (italique ajouté par mes soins) ?
Paris Europlace publie ce jour un Guide du dialogue actionnarial qui entend accompagner les émetteurs et les investisseurs dans les attentes et les résultats que chacun peut espérer en matière de partage d’informations. L’attractivité d’une Place dépend aussi de la capacité qu’ont les entreprises à répondre aux sollicitations des investisseurs, et de la disposition des investisseurs à correctement apprécier la stratégie des entreprises et l’environnement dans lequel elles évoluent.
Ce guide
traite uniquement du dialogue «privé», à l’exclusion donc du dialogue «public» susceptible d’intervenir lors des assemblées générales, lequel est encadré juridiquement et soulève des questions particulières.
Ce dialogue privé, c’est ce que les gérants d’actifs appellent l’”engagement”.
Les principes pour un dialogue actionnarial constructif :
Engager un dialogue permanent
Engager un dialogue large et ouvert, tout en respectant ses limites
Engager un dialogue constructif
Privilégier le dialogue afin de garantir le caractère loyal et équitable des échanges
Parmi les bonnes pratiques, qu’elles soient à destination des émetteurs (les sociétés cotées) ou des actionnaires mentionnées par le guide, celle-ci :
Dialoguer également en cas de dissensions
Pour les émetteurs, ces recommandations :
En cas de dissensions entre l’émetteur et certains de ses actionnaires, il est souhaitable – lorsqu’une évolution des positions respectives est envisageable – que le dialogue se poursuive afin de tenter de parvenir à un accord. D’une manière générale, il est de bonne pratique que l’émetteur s’efforce d’informer le(s) actionnaire(s) concerné(s) des suites qu’il entend donner à un dialogue faisant apparaître des dissensions (poursuite ou fin du dialogue, changement d’interlocuteur, réflexion en interne…).
Pour les actionnaires, ces recommandations :
En cas de dissensions entre l’émetteur et certains de ses actionnaires, il est souhaitable – lorsqu’une évolution des positions respectives est envisageable – que le dialogue se poursuive afin de tenter de parvenir à un accord. Les actionnaires pourraient ainsi s’efforcer de continuer à échanger avec l’émetteur, même lorsqu’ils souhaitent rendre publiques leurs dissensions. D’une manière générale, il est de bonne pratique que les actionnaires s’efforcent d’informer l’émetteur des conséquences qu’ils entendent donner à un dialogue faisant apparaître des dissensions (soutien, escalade, désengagement…).
Et pour les actionnaires activistes, ce paragraphe (italique ajoutée par mes soins) :
Cette bonne pratique est particulièrement bienvenue dans le cas de démarches communément qualifiées d’activisme actionnarial, dont il est souhaitable qu’elles soient précédées des contacts adéquats avec les émetteurs, ménageant des délais raisonnables et favorisant un dialogue aussi constructif que possible.
Avant toute campagne publique, les actionnaires pourraient donc transmettre à l’émetteur un document («white paper») qui décrit leurs projets et propositions ainsi que leur argumentation, puis laisser un délai raisonnable à l’émetteur afin qu’il puisse corriger d’éventuelles erreur matérielles et faire part de ses observations.
Ce court guide mérite d’être lu.
Des nouvelles du #H2Ogate
Avertissement : j'ai assisté entre novembre 2022 et avril 2023 l'Association Collectif Porteurs H2O dans le cadre d'une mission rémunérée (détails ici). A vous de déterminer si elle influe sur ma couverture de l'affaire H2O AM sur ce blog.
Décidément, les voies de l’AMF sont toujours aussi impénétrables.
Le régulateur a en effet eu la riche idée de cesser de mettre à jour le site fournissant les données sur les OPCVM sans avoir mis en ligne de nouvelle version.
Les dernières données disponibles sont en date du 21 mars 2024. Nous sommes le 3 juillet 2024. Allô Houston, y a-t-il quelqu’un aux commandes ?
Je ne peux donc plus suivre la décollecte des fonds H2O AM. Pour les données de performance, je me fournis ailleurs que sur le site de l’AMF et peux donc les mettre à jour, mais elles n’ont aucune importance.
Depuis la scission des 7 fonds sinistrés de H2O AM, il est très difficile de reconstituer la performance des « vieux » fonds d’avant la scission.
Je me livre à l’exercice en calculant une valeur liquidative reconstituée, égale à la somme de la valeur liquidative des « nouveaux » fonds liquides (FCP à la fin du nom) et de la valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets.
Cette valeur liquidative reconstituée est une fiction, car aucune transaction n’est possible sur les side-pockets.
Mais elle permet de voir où en sont les porteurs de parts. Notamment par rapport au plus-haut historique atteint par les « vieux » fonds avant qu’ils ne heurtent des icebergs et fassent naufrage en février et mars 2020.
Autre limite de l’exercice : rien ne dit que les porteurs de parts récupèreront l’équivalent de la dernière valeur liquidative estimative des side-pockets. On ne le saura que quand toutes les participations illiquides auront été revendues au seul acheteur, Tennor, la holding de Lars Windhorst.
Ou plus exactement au fur et à mesure du remboursement par Tennor de la « first super senior secured note » (FSSSN) émise par Tennor, portant intérêt au taux annuel de 4,5% et prévoyant la possibilité de remboursements intermédiaires. Je rappelle (j’en avais parlé ici) que le remboursement total était initialement prévu début 2022. Les créanciers de Tennor, pour éviter la mise en liquidation de la société imposée par un tribunal néerlandais, ont consenti un délai supplémentaire de 6 mois (soit un remboursement début juillet 2022).
Je rappelle aussi que, comme de bien entendu, il n'y a eu aucun remboursement entre juillet et décembre 2022 de la part de Tennor.
Début janvier 2023, H2O AM a laissé entendre dans un communiqué sybillin que Tennor avait procédé fin 2022 à un premier remboursement partiel susceptible de permettre de diminuer le nominal de la FSSSN de 250 millions d'euros.
En fait de 250 millions, ce sont 143,752 millions qui ont été remboursés d'après mes calculs.
Par ailleurs, un porte-parole de Tennor avait déclaré début janvier au quotidien régional allemand Westfallen-Blatt que la holding de Lars Windhorst avait procédé en 2022 à plusieurs remboursements partiels de la FSSSN, dont un fin 2022 pour solde de tout compte.
Après avoir cessé pendant des mois de mettre à jour la valeur estimative mensuelle de side-pockets, bloquée à fin février 2023, H2O AM a dû se résoudre le 12 septembre 2023 à la baisser pour les 7 fonds.
Puis de nouveau en octobre pour les valeurs estimatives à fin septembre. Puis de nouveau en décembre pour les valeurs estimatives à fin novembre.
En janvier 2024, coup de théâtre : la valorisation estimative à fin décembre 2023 est en hausse.
H2O AM, généralement mutique, publiait le 26 janvier 2024 un communiqué de presse pour annoncer « un nouveau remboursement dans les prochaines semaines ».
Remboursement « de l’ordre de 70 millions d’euros ».
Puis nouveau coup de bambou sur les valorisations à fin janvier, en baisse de 109 millions d'euros (voir ci-dessus), avant même que les 70 millions d'euros annoncés aient été remboursés aux porteurs de parts.
Les 20, 21 et 22 mars arrivait le remboursement annoncé : H2O AM avait retenu la leçon de sa désastreuse communication sur le premier remboursement et avait choisi d'annoncer un montant inférieur au montant réel, qui est de 85 millions d'euros, répartis comme suit.
Entre la valorisation initiale d’octobre 2020 et celle de fin mai 2024, compte tenu des remboursements de janvier 2023 et mars 2024, la moins-value latente sur les 7 side-pockets est de près de 1 milliard 331 millions d’euros d’après mes calculs.
La valeur résiduelle des side-pockets à fin mai 2024 est estimée à 81,592 millions d'euros.
S'il n'y a de nouveau remboursement après celui de mars, la perte totale pour les porteurs de parts de side-pockets pourrait donc dépasser 1 milliard et 417 millions d'euros.
C'est le casse du siècle.
Pour les fonds liquides, voilà où on en est au 27 juin 2024 (date de la VL des fonds liquides dont le nom se termine par « FCP », la dernière valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets étant en date du 31 mai 2024).
J'ai ajouté à la VL reconstituée le montant des distributions de janvier 2023 et de mars 2024.
En matière de décollecte, voilà où on en était au 21 mars 2024 (merci et bravo à l’AMF, voir ci-dessus).
En matière de performance, voilà où on en est.
Les produits dont il a été question dans ma semaine Twitter 26 peuvent être achetés en priorité chez votre libraire (pour les livres).
Sinon, si vous n’avez vraiment pas accès à un libraire, ou pour les livres en anglais, parfois plus difficiles à se procurer en librairie en France, vous pouvez cliquer sur les liens disséminés dans ce billet (informations sur le programme d’affiliation Amazon ici).
Vous pouvez suivre le compte Twitter d’Alpha Beta Blog ici et mon compte en anglais là.
Je ne suis pas habilité à donner des conseils sur les produits de placement : ne me sollicitez pas pour cela car je ne vous répondrai pas.
Si vous avez des questions, consultez un conseiller en investissement financier. Un conseiller en investissement financier, c’est quelqu’un que vous payez pour qu’il.elle vous donne des conseils. Dans le jargon de MIF 2, seul le conseiller exclusivement payé par ses clients peut se déclarer indépendant.
Quelqu’un qui est payé par les fournisseurs de produits pour vous vendre lesdits produits, c’est un vendeur, pas un conseiller.
Comment trouver un conseiller en investissements financiers (CIF) indépendant au sens de MIF 2 ? C'est à peu près mission impossible : le site de l'ORIAS, qui est l'organisme auprès duquel s'enregistrent les CIF, ne permet pas de rechercher selon les critères "indépendant" ou "non-indépendant". Pas plus que ne le permettent les sites des 4 associations de CIF agréées par l'AMF.
C'est affligeant et scandaleux.
La charte éditoriale d’Alpha Beta Blog est consultable ici.
C’était ma semaine Twitter 26 de 2024. Sayōnara. さようなら.
Quel étrange subjonctif. Avec un tel degré de conviction, l’indicatif s’imposait pourtant.
Par procuration, merci à ma mandataire.
Pirsonnellement en pirsonne, comme le dirait Catarella dans un livre de Camilleri.
Quoique défunte.
Les vents finissent toujours par tourner.
Comme toujours, et comme tout ce que j’écris dans ce blog, ce n’est évidemment pas une recommandation d’investissement.
Dont moi, depuis 1989, époque lointaine où le contrat Afer était parmi les meilleurs du marché à condition de ne pas payer de frais sur versement, ce qui était mon cas.
Bis : ce n’est évidemment pas une recommandation d’investissement.
Excellent, comme d'habitude, merci :)