Ma Semaine Bluesky 18 de 2025
Le luxe financier pour presque tous, c'est pour presque bientôt
Warren Buffett a donc annoncé lors de l’assemblée générale des actionnaires de Berkshire Hathaway qui s’est tenue à Omaha le samedi 3 mai qu’il cèderait son fauteuil de PDG à Greg Abel d’ici à la fin de l’année.
Il aura alors 95 ans (il est né le 30 août 1930), ce qui est un âge raisonnable pour prendre sa retraite.
L’excellent Jason Zweig, journaliste au Wall Street Journal, a expliqué dans “Why There Will Never Be Another Warren Buffett” pourquoi Warren Buffett était unique. Il avance trois facteurs.
L’individu. Warren Buffett est accro à la bourse1 depuis l’achat de ses premières actions en 1942, alors qu’il avait 11 ans. Il a sacrifié sa vie familiale et sa vie sociale à la lecture des rapports annuels. “Son exposition inégalée à l’information financière, combinée à sa mémoire prodigieuse, a fait de Buffett une forme humaine d’intelligence artificielle. Il pouvait répondre à n’importe quelle requête à interrogeant sa base de données interne. Ce qui lui a donné une capacité sans égal à identifier la substantifique moëlle au sein de toute parcelle d’information nouvelle —et un avantage durable par rapport aux autres investisseurs. Maintenant que l’IA est universellement disponible , une personne avec la maîtrise des données de Buffett n’aura même plus d’avantage dans le futur”.
L’époque. Buffett reconnaît qu’il a eu la chance de naître au bon moment (en 1930) et au bon endroit (aux Etats-Unis)2. De pouvoir étudier auprès de Ben Graham. De commencer à investir quand la gestion indicielle n’existait pas. “Il a construit son historique de performance initial, phénoménal, en pêchant là où personne n’envisageait de lancer sa canne à pêche. Il s’est nourri du plancton le plus minuscule du marché actions”3.
Le véhicule d’investissement. Berkshire Hathaway (BH) n’est pas un fonds : c’est une société cotée, qui n’a jamais fait d’augmentation de capital depuis que Buffett en a pris le contrôle en 1965. “Par construction, [BH] ne facture pas de frais de gestion qui viendraient en déduction de sa performance, ni de commission de surperformance qui pourrait encourager à la prise de risque excessive pour décrocher le gros lot.” N’étant pas structuré comme un fonds à capital variable, BH n’a pas eu à gérer d’afflux massif de souscriptions, ni à faire face à des rachats massifs, qui sont le lot des gérants traditionnels. Ceci “a donné à Buffett un avantage structurel qui lui a permis de s’intéresser à des opportunités [d’investissement] où et quand il les a identifiées. C’est un luxe que presque aucun autre professionnel n’a —ni ne souhaite avoir.”
Le coup de pied de l’âne de Zweig aux gérants traditionnels :
Tant que la plupart des gérants de fonds gagneront beaucoup d’argent en sous-performant le marché, le vrai risque pour eux serait d’utiliser une autre approche. Les poules auront des dents4 avant [qu’un gérant] ait le culot de tenter d’utiliser la même approche que Warren Buffett.
Pas mieux.
Berkshire Hathaway est évidemment présent dans les indices MSCI USA, MSCI World et MSCI ACWI.
S’il n’y a pas eu de semaines Bluesky 16 et 17, c’est parce qu’un virus grippal m’a mis KO. L’an prochain, je me fais vacciner.
J'ai lancé en novembre 2023 un Substack à destination des investisseurs privés, L'Odyssée des Placements. Mon objectif ? Contribuer à améliorer la littératie financière des abonné.e.s.
Le lancement est parrainé par Indexa Capital, qui commercialise en France le contrat d'assurance vie en gestion sous mandat le moins cher (j'en avais parlé ici) : Indexa Vie Spirica. Vous pourrez bénéficier sous conditions d'une remise pendant un an sur les frais d'assurance et de mandat en suivant ce lien.
J’avais parlé ici de ma découverte d’un flic assez improbable : Yeruldelgger, commissaire à Oulan-Bator en Mongolie et créature de Ian Manook5. J’avais adoré le premier volet de la trilogie, Yeruldelgger.
J’ai depuis lu les opus 2 (Les temps sauvages) et 3 (La mort nomade). Outre le caractère très dépaysant du lieu de l’intrigue, la trilogie s’intéresse à des sujets géopolitiques d’actualité : la course aux minerais, aux métaux et aux terres rares.
Tenez, regardez ce que j’ai trouvé dans le dernier “Guide to the Markets” de JPMorgan AM.
Je suis certain que la réalité est proche de la fiction. Voire pire.
Au moment du procès de Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo de Lyon, qui eut lieu dans cette même ville entre le 11 mai et le 4 juillet 1987. J’avais 21 ans, n’étais pas encore obsédé par ce que l’on commençait à appeler la Shoah, et n’ai que peu de souvenirs du procès.
Shoah, c’est le titre du chef d’oeuvre de Claude Lanzmann sorti en 1985.
France TV diffuse actuellement trois documentaires sur le procès de Klaus Barbie, le procès de Paul Touvier et le procès de Maurice Papon.
J’ai vu les trois épisodes consacrés au procès Barbie et c’est un immense moment d’histoire. Je rappelle que Robert Badinter, alors Garde des Sceaux, avait autorisé exceptionnellement les caméras dans la salle d’audience.
Le documentaire de Gabriel Le Bomin mélange captations de l’époque et témoignages récents des acteurs du procès, notamment les avocats des parties civiles dont Serge Klarsfeld et Alain Jakubowicz.
Dans le deuxième épisode, la déposition de Simone Lagrange, qui fut arrêtée, torturée et déportée à Auschwitz à 13 ans, est bouleversante.
Sorj Chalandon, alors journaliste à Libération6, avait couvert le procès Barbie. Il fait partie des personnes interrogées dans le documentaire.
Le père de Sorj Chalandon était un salaud. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est son grand-père qui le lui a dit : dans Enfant de salaud, Chalandon raconte les mensonges de ce père qui a combattu pour les Allemands pendant la seconde guerre mondiale.
Ce livre a été adapté en BD par Sébastien Gnaedig et Isabelle Merlet, sous le même titre.
Chalandon avait commencé à régler ses comptes avec son père en 2015, dans Profession du père.
Mon père a été chanteur, footballeur, professeur de judo, parachutiste, espion, pasteur d’une Eglise pentecôtiste américaine et conseiller personnel du général de Gaulle jusqu’en 1958. Un jour, il m’a dit que le Général l’avait trahi. Son meilleur ami était devenu son pire ennemi. Alors mon père m’a annoncé qu’il allait tuer de Gaulle. Et il m’a demandé de l’aider.
Je n’avais pas le choix.
C’était un ordre.
J’étais fier.
Mais j’avais peur aussi…
À 13 ans, c’est drôlement lourd un pistolet.
J’aime beaucoup Sorj Chalandon. J’ai hâte de lire son dernier roman, L’enragé7.
Ça parle de quoi ?
D’une histoire vraie : dans la nuit du 27 août 1934, cinquante-six garçons se révoltent et s’évadent de la colonie pénitentiaire pour mineurs de Belle-Ile-en-Mer. La chasse est ouverte. Tous sont capturés, sauf un, Jules Bonneau dit « la Teigne », dont Chalandon raconte l’histoire.
Jacques Prévert en a fait un poème, “La chasse à l’enfant”, paru dans le recueil Paroles.
Le voici chanté par Marianne Oswald. La musique est de Joseph Kosma.
Ma madeleine à moi (ou mon Rosebud), c’est le lilas. Dans le jardin du Vexin, ils sont en fleur. Ni une ni deux, j’envoie la photo sur Bluesky.
Puis je tombe là-dessus sur le même Bluesky.
Marie Bernard me fait hurler de rire, ça fait vraiment du bien en ce moment.
Vous trouvez ce billet trop long ? J’ai fait la synthèse de ce qui suit dans une vidéo de moins de 3 minutes.
Vous pouvez vous abonner à la chaîne YouTube d’Alpha Beta Blog ici.
Je suis de plus en plus actif sur mon compte Bluesky, réseau social ressemblant à X/Twitter, en beaucoup plus civilisé.
Bienvenue dans ma semaine Bluesky 18 de 2025.
Et mon triangle de sécurité, tu l’aimes ?
Le triangle de sécurité, c’est l’argument central du pitch de vendeurs d’assurance vie luxembourgeoise.
Qui serait bien mieux que l’assurance vie française pour deux raisons principales :
Le fameux triangle de sécurité. En cas de faillite de l’assureur, l’assuré est indemnisé à hauteur de 70 000 € maximum en France. Au Luxembourg, le triangle de sécurité garantit en théorie qu’il retrouvera l’intégralité de ses avoirs.
Le contrat d’assurance vie luxembourgeois n’est pas soumis aux modalités de la loi Sapin 2, qui permet en France à l’assureur de suspendre les rachats sur un contrat d’assurance vie en cas de turbulence.
BoursoBank, dont le contrat d’assurance vie française BoursoVie fait partie des plus chers des contrats vendus en ligne8, vient d’annoncer le lancement du contrat BoursoVie Lux, assuré par Sogelife, la compagnie d’assurance vie du groupe SocGen auquel appartient BoursoBank.
Attention hein, ce n’est pas pour tout le monde. Il faut d’abord être client de l’offre BoursoFirst et ça coûte 29 € par mois. J’avais parlé de cette offre ici.
Ça rapporte quoi de payer 29 € par mois ? Des avantages exclusifs. Et la garantie d’obtenir une réponse en moins de 24 heures9.
Donc, ce triangle de sécurité.
Selon Sogelife (source),
[l]’un des avantages les plus importants du contrat d’assurance vie souscrit auprès d’une compagnie d’assurance luxembourgeoise est le système de protection des créances d’assurance appelé « Triangle de sécurité ». Ce triangle de sécurité fait intervenir trois acteurs : la société d’assurance, la banque dépositaire et le Commissariat aux Assurances (CAA).
En cas de faillite de l’assureur, les actifs des assurés sont en théorie totalement ségrégués, là où, pour un contrat d’assurance vie français, le plafond d’indemnisation par le Fonds de Garantie des Assurances est de 70 000 euros.
Il se trouve qu’un assureur vie a fait faillite au Luxembourg, auprès duquel 30 000 contrats avaient été souscrits par des assurés français, probablement via des courtiers d’assurance tombés sous le charme du triangle de sécurité et de la non-soumission à la loi Sapin 2 : FWULife Insurance Lux10 avait été déclaré insolvable le 4 août 2024 et sa dissolution et sa liquidation avaient été prononcées le 31 janvier 2025.
J’y reviens.
BoursoVie est un contrat qui a été de qualité lors de son lancement et qui est aujourd’hui des plus médiocres au sein de l’offre pléthorique des contrats distribués sur internet : il est cher et son fonds euros historique, Eurossima, est très mauvais11.
Il va donc cohabiter avec BoursoVie Lux, un contrat FAS (fonds d’assurance spécialisée) assuré par Sogelife. Comme il n’y a pas de fonds euros, pas de risque de déception.
Le contrat est en gestion libre et donne accès à 4000 produits : actions, OPCVM. Le moteur de recherche OPCVM du site BoursoBank est tellement mauvais qu’il est impossible de rechercher les ETF au sein de cette offre pléthorique. Je suppose qu’il y en a. J’espère qu’il y en a.
Heureux adhérents au service BoursoFirst, vous avez bien de la chance : alors que le montant minimum requis pour souscrire à un contrat d’assurance vie luxembourgeois est généralement de 250 000 €, exceptionnellement, parce que c’est vous, et dans le cadre de la (presque) démocratisation de (presque) tout, vous pourrez y accéder dès 150 000 €. C’est donné, non ?
Quant aux frais du contrat, ils sont tout aussi donnés12 : 0,65% par an. Ah, et comme vous avez accès à des actions13, il faudra payer 0,15% de frais de transaction à l’achat et à la vente.
Parmi les nouveautés à venir, des produits structurés sur mesure et des fonds de private equity, forcément sélectionnés parmi les plus performants.
Revenons à FWULife Insurance Lux et au fameux triangle de sécurité. Ce cadre n’empêche évidemment pas la liquidation d’une compagnie défaillante. Quant à la récupération des avoirs, elle n’est pas rapide.
Si l’on en croit Gilles Roth, ministre des finances du Luxembourg interrogé par L’Agefi Alpha,
[d]epuis le jugement de liquidation du 10 janvier 2024, les investisseurs ne sont pas laissés sans recours : ils recevront une part des actifs. Pour faciliter les démarches, le curateur a mis en place un système de déclaration de créances prérempli, simplifiant ainsi les procédures administratives et judiciaires. Certes, la liquidation prend du temps, mais le système a joué son rôle et continue de fonctionner.
Je ne suis pas sûr de comprendre ce que veut dire : “ils recevront une part des actifs”. J’aurais préféré lire : “Ils recevront l’intégralité de leurs actifs”.
Non, vous ne rêvez pas, je me suis permis avec le titre de cette vignette un clin d’oeil à la scène culte du Mépris, l’une des plus belles du cinéma selon moi.
La voilà. La musique est de Georges Delerue, qui aurait eu 100 ans en 202514.
Ramify réplique à Boursorama
Les courtiers en ligne se marquent à la culotte, ce qui est plutôt plaisant dans un paysage de la distribution de produits de placements dominé par des dinosaures endormis depuis toujours.
Quelques jours après l’annonce du lancement de BoursoVie Lux, Ramify, envoyait un courrier électronique étrangement rédigé, que j’essaie de décrypter ici.
J’y apprenais que les souscriptions au contrat d’assurance vie luxembourgeois de Ramify, qui ne semble pas avoir de nom, étaient ouvertes.
Vous pouvez désormais ouvrir votre contrat d'assurance-vie luxembourgeoise 100 % digital dès 100 000 € (au lieu de 250 000 € précédemment).
Je suppose que précédemment, c’était avant le lancement effectif.
Et qu’entre précédemment et l’envoi de ce courrier électronique, il y a eu le lancement de BoursoVie Lux avec son ticket d’accès à 150 000 €.
Il fallait donc faire quelque chose.
Eh chef, si on baissait le ticket d’entrée à 100 000 € ?
Mieux encore :
L'offre de lancement (frais de gestion Ramify offerts pendant 1 an jusqu'à 5 000 €) a déjà suscité un fort intérêt parmi les investisseurs sur liste d'attente.
Tellement fort qu’”[i]l reste désormais moins de 100 contrats pour profiter de l'offre.”
Vite, il n’y en aura pas pour tout le monde ! Moins de 100 contrats à prix cassés !
Ce contrat luxembourgeois n’est pas en gestion libre, pour permettre aux clients de profiter de la stratégie “Ramify Essential qui a généré jusqu'à +18,9 % en 2023 et +27,1 % en 2024.”
Je suppose que Ramify Essential est une stratégie propriétaire à base d’ETF qui fut très performante en 2023 et 2024. Je suppose aussi que les performances mentionnées sont nettes de tous frais de contrat d’assurance vie.
Je me demande pourquoi les données de performance de 2022 ne sont pas mentionnées15.
Je résume : ce contrat assuré par AG2R La Mondiale et propulsé par Ramify Essential a des frais annuels de 1%. C’est plus cher que les frais du contrat BoursoVie Lux, qui est en gestion libre, mais c’est le prix pour accéder à une gestion sous mandat qui fut performante en 2023 et 2024.
Ramify a évidemment pensé à vous et supprime carrément ses frais la première année (0,6% par an si je calcule bien) pour quelques heureux élus, et dans la limite de 5000 euros.
Les énormes ficelles de la vente à l’arrache (“il n’y en aura pas pour tout le monde”, “moins de 100 contrats disponibles à des conditions avantageuses) me font ricaner, mais au moins, ça bouge.
J’espère vraiment que les dinosaures qui roupillent sont en train de comprendre qu’il va falloir se réveiller et défendre leur fromage16.
Parlons frais
Alors qu’il semble toujours aussi difficile de parler d’éducation sexuelle à l’école, je note avec satisfaction que les frais font enfin partie de la conversation quand on parle de produits de placement.
Grâce notamment aux régulateurs, qui ont fini par réaliser qu’une de leurs missions consistait à protéger les intérêts des investisseurs de détail, que les frais venaient en déduction de la performance, que les fournisseurs et les distributeurs de produits évitaient toute forme de concurrence tarifaire.
En Europe, on n’en est pas encore au niveau de granularité des Etats-Unis, où le rapport annuel de l’Investment Company Institute (ICI, le lobby des gérants d’actifs) est d’une très grande richesse (la dernière édition du Fact book est ici), mais il y a vraiment du mieux.
L’ESMA — le régulateur des marchés financiers dans l’Union européenne — vient de publier son étude annuelle sur la performance et les frais des OPCVM destinés aux investisseurs de détail en Europe, avec des données à fin 2023.
Pour les fonds UCITS, l’ESMA a augmenté son taux de couverture, passant de 85% à 94% des encours entre fin 2022 et fin 202317, soit l’équivalent de 10 200 milliards d’euros, dont 6 400 seraient détenus par des investisseurs de détail.
L’étude de l’ESMA couvre également les FIA (fonds d’investissement alternatifs) et les produits structurés. Pour la première famille de produits, l’approche est insuffisamment granulaire et pour la seconde famille, qui vient de faire l’objet d’une navrante étude conjointe de l’AMF et de l’ACPR (dont j’avais parlé ici), il n’y a rien d’intéressant dans l’étude.
Je m’intéresserai donc à la famille des fonds conformes à la directive OPCVM (UCITS en anglais), pour laquelle l’ESMA distingue les fonds actifs traditionnels, les fonds indiciels traditionnels et les ETF. Pour ces derniers produits, pas encore de distinction entre ETF indiciels et ETF gérés activement. Il faudra y penser rapidement, la croissance des encours des ETF actifs étant importante.
A souligner : l’ESMA fournit des données de performance avant inflation et après inflation. La seule performance qui importe pour un investisseur est évidemment la performance après inflation.
Sur la période 2019-2023, on apprend que les investisseurs en fonds obligataires et en fonds mixtes ont obtenu en moyenne des performances nettes d’inflation négatives.
Seuls les investisseurs en fonds actions ont obtenu en moyenne des performances nettes d’inflation positives : 1,7% par an pour les investisseurs en fonds actions traditionnels, 4,1% par an pour les investisseurs en ETF actions18.
A fin 2023, les frais ont continué à baisser. N’attachez pas trop d’importante aux frais de souscription et de rachat en raison d’un changement de méthodologie.
Notez la forte baisse des frais récurrents des ETF actions entre 2019 et 2023 (-26,7%) et la très faible baisse des frais récurrents des fonds actions sur la même période (-4,9%). Si la concurrence existe sur le marché des ETF, elle est à peu près inexistante sur le marché des fonds actions traditionnels.
En matière de frais récurrents à fin 2023, les fonds traditionnels actions sont en moyenne 6,39 fois plus chers que les ETF actions. Ça fait un sacré vent de face.
L’ESMA a séparé les fonds (hors ETF) gérés activement des fonds (hors ETF) indiciels pour en comparer l’écolution annuelle des frais récurrents. J’ai retiré du tableau ci-dessous les frais année après année sur 10 ans glissants et n’ai conservé que l’évolution annuelle des frais, pour des raisons de lisibilité.
J’y trouve une incohérence : là où l’ESMA mentionnait une baisse des frais récurrents de 26,7% pour les ETF actions entre 2019 et 2023 (premier des deux tableaux ci-dessus), elle n’est que de 10% dans le tableau ci-dessous).
Les fonds traditionnels indiciels actions sont plus chers que les ETF et les frais des fonds actifs sont 3,5 fois plus élevés que ceux des fonds indiciels, et 4,8 fois plus élevés que ceux des ETF à fin 2023.
Même constat pour les fonds obligations, avec une moindre différence entre les frais des fonds actifs et ceux des fonds et ETF indiciels.
L’ESMA rappelle que la transition des DICI UCITS aux DIC PRIIPS a imposé la publication d’une nouvelle catégorie de frais : les frais de transaction. On apprend que les fonds actions ont les frais de transaction les plus bas (0,174% des encours), les fonds obligataires et mixtes ayant un niveau de frais supérieur (0,18% des encours).
Ce rapport annuel sur les performances et les coûts a le mérite d’exister. Il est perfectible : granularité insuffisante, complexité excessive.
Protection anti-tonte
Je m’étais réjoui ici de l’annonce par l’AMF de la suppression à terme des commissions de mouvement perçues dans le cadre de la gestion sous mandat en compte-titres.
J’écrivais ceci :
Le régulateur laisse une porte ouverte pour que la prédation se poursuive (italique ajouté par mes soins sur la partie importante) :
Au vu des conflits d’intérêts liés à ce mode de rémunération, le Collège de l’AMF a décidé d’interdire, pour les gérants de mandats, la perception de commissions de mouvement assises sur le montant des transactions réalisées ; ce qui n’interdit pas à la même entité de percevoir une rémunération de cette nature si elle fournit le service de tenue de compte conservation.
Et je m’interrogeais sur cette précision de l’AMF :
L’AMF mettra prochainement à jour sa doctrine pour préciser les modalités de mise en œuvre de cette interdiction, notamment afin d’éviter un report des conflits d’intérêts liés à ce mode de rémunérations sur d’autres prestations fournies au mandant.
Jouant les benêts :
Comment ça ? Les sociétés accros aux commissions de mouvement pourraient essayer de se refaire sur d’autres prestations ?
Evidemment que la tentation existe ! Evidemment que l’AMF le sait !
Le régulateur a donc précisé le dispositif anti-tonte mis en place.
L’AMF a modifié la position-recommandation DOC-2013-10,
en particulier pour tenir compte de l’interdiction à venir de ces commissions, y compris s’agissant de la perception de droits d’entrée et de sortie non acquis au fonds, mais aussi préciser ses attentes sur la tarification du client dans le cas où le teneur de compte-conservateur et le gérant sont une seule et même entité ou appartiennent au même groupe.
Il est dorénavant prévu (italique ajouté par moi)
que lorsque le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers est proposé dans le cadre d’une offre groupée, notamment avec le service de tenue de compte-conservation (que celui-ci soit proposé par la même entité ou par une autre entité), les coûts et frais relatifs à chaque service doivent figurer dans le mandat conclu avec un client non professionnel.
L’AMF rappelle que
les commissions de mouvement restent autorisées pour le service de tenue de compte-conservation dont l’activité est par nature liée au volume de transactions. Néanmoins, dans les cas où ce service est fourni par le gérant du mandat ou par une entité du même groupe, il existe – comme pour les commissions de mouvement prélevées par le gérant du mandat – un risque de conflit d’intérêt.
A savoir une incitation monétaire directe à faire tourner le portefeuille, cette exécrable pratique d’un autre âge, âge malheureusement pas tout à fait révolu19.
L’AMF a donc prévu un encadrement spécifique de ces situations (italique ajouté par mes soins).
Pour limiter tout report des conflits d’intérêts par le biais d’autres modalités de tarification comportant le même risque de conflit d’intérêt, la doctrine de l’AMF mise à jour prévoit un encadrement spécifique de ces situations. Ainsi, dans ces configurations, le teneur de compte conservateur devra justifier sa tarification de manière à démontrer qu’elle n’est pas significativement supérieure à celle applicable à la même prestation fournie en dehors de la gestion sous mandat ou avec d’autres gérants hors groupe.
Je sens que le terme “pas significativement supérieure” va faire les délices des partisans de la souplesse interprétative en matière de conformité.
Des nouvelles du #H2Ogate
Avertissement : j'ai assisté entre novembre 2022 et avril 2023 l'Association Collectif Porteurs H2O dans le cadre d'une mission rémunérée (détails ici). A vous de déterminer si elle influe sur ma couverture de l'affaire H2O AM sur ce blog.
Des nouvelles de Lars, un peu toujours les mêmes tant Lars est un individu prévisible depuis qu’il a commencé à faire des affaires.
Evidemment, toujours pas de publication des comptes 2022 et 2023 de Wild Bunch, la société allemande cotée détenue à plus de 98% par Voltaire Finance, une entité “Windhorst”. Cette publication, repoussée à maintes reprises, était prévue le 21 avril. Pâques est derrière nous, la Trinité, c’est le dimanche 15 juin. A Pâques, ou à la Trinité. Attendons la fumée blanche.
Evidemment, Lars a laissé une ardoise dans un prestigieux immeuble de Manhattan, One Vanderbilt. Selon le site CREDaily, Tennor Holding B.V. avait signé un bail de 10 ans en janvier 2022 pour une occupation à partir de mi-2023, tout en signant un bail temporaire pour 7000 pieds carrés mais a fait défaut sur les paiements de ce bail temporaire à partir de septembre 2022. Selon SL Green, le plus grand propriétaire de bureaux de Manhattan, après un accord de court terme et un rééchelonnement des paiements, Tennor aurait cessé tout paiement à partir d’août 2023, ce qui a conduit SL Green à résilier les baux et à porter plainte contre Tennor et à réclamer 13,8 millions de dollars de loyers impayés et 1,7 million de dollars de frais divers.
Honnêtement, le plus grand propriétaire de bureaux de Manhattan a loué des bureaux à Tennor Holding B.V. en janvier 2022 ? Ces gens-là sont-ils donc incompétents à ce point ?
Pas de mise à jour des données de performance et de collecte depuis la dernière fois, le nouveau site destiné au public de l’AMF refusant d’afficher l’historique des valeurs liquidatives et des encours. J’espère que ce bug sera bientôt réparé. Je rappelle qu’il avait fallu patienter près d’un an pour que ce nouveau site soit lancé après la déconnexion du précédent.
Il est donc inutile de lire ce qui suit si vous avez lu ma précédente semaine Bluesky.
Depuis la scission des 7 fonds sinistrés de H2O AM, il est très difficile de reconstituer la performance des « vieux » fonds d’avant la scission.
Je me livre à l’exercice en calculant une valeur liquidative reconstituée, égale à la somme de la valeur liquidative des « nouveaux » fonds liquides (FCP à la fin du nom) et de la valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets.
Cette valeur liquidative reconstituée est une fiction, car aucune transaction n’est possible sur les side-pockets.
Mais elle permet de voir où en sont les porteurs de parts. Notamment par rapport au plus-haut historique atteint par les « vieux » fonds avant qu’ils ne heurtent des icebergs et fassent naufrage en février et mars 2020.
Autre limite de l’exercice : rien ne dit que les porteurs de parts récupèreront l’équivalent de la dernière valeur liquidative estimative des side-pockets. On ne le saura que quand toutes les participations illiquides auront été revendues au seul acheteur, Tennor, la holding de Lars Windhorst.
Ou plus exactement au fur et à mesure du remboursement par Tennor de la « first super senior secured note » (FSSSN) émise par Tennor, portant intérêt au taux annuel de 4,5% et prévoyant la possibilité de remboursements intermédiaires. Je rappelle (j’en avais parlé ici) que le remboursement total était initialement prévu début 2022. Les créanciers de Tennor, pour éviter la mise en liquidation de la société imposée par un tribunal néerlandais, ont consenti un délai supplémentaire de 6 mois (soit un remboursement début juillet 2022).
Je rappelle aussi que, comme de bien entendu, il n'y a eu aucun remboursement entre juillet et décembre 2022 de la part de Tennor.
Début janvier 2023, H2O AM a laissé entendre dans un communiqué sybillin que Tennor avait procédé fin 2022 à un premier remboursement partiel susceptible de permettre de diminuer le nominal de la FSSSN de 250 millions d'euros.
En fait de 250 millions, ce sont 143,752 millions qui ont été remboursés d'après mes calculs.
Par ailleurs, un porte-parole de Tennor avait déclaré début janvier au quotidien régional allemand Westfallen-Blatt que la holding de Lars Windhorst avait procédé en 2022 à plusieurs remboursements partiels de la FSSSN, dont un fin 2022 pour solde de tout compte.
Après avoir cessé pendant des mois de mettre à jour la valeur estimative mensuelle de side-pockets, bloquée à fin février 2023, H2O AM a dû se résoudre le 12 septembre 2023 à la baisser pour les 7 fonds.
Puis de nouveau en octobre pour les valeurs estimatives à fin septembre. Puis de nouveau en décembre pour les valeurs estimatives à fin novembre.
En janvier 2024, coup de théâtre : la valorisation estimative à fin décembre 2023 est en hausse.
H2O AM, généralement mutique, publiait le 26 janvier 2024 un communiqué de presse pour annoncer « un nouveau remboursement dans les prochaines semaines ».
Remboursement « de l’ordre de 70 millions d’euros ».
Puis nouveau coup de bambou sur les valorisations à fin janvier 2024, en baisse de 109 millions d'euros (voir ci-dessus), avant même que les 70 millions d'euros annoncés aient été remboursés aux porteurs de parts.
Les 20, 21 et 22 mars 2024 arrivait le remboursement annoncé : H2O AM avait retenu la leçon de sa désastreuse communication sur le premier remboursement et avait choisi d'annoncer un montant inférieur au montant réel, qui est de 85 millions d'euros (voir tableau ci-dessous).
Le 7 août 2024, après la publication du rapport accablant de la FCA (le régulateur britannique) détaillant les nombreux mensonges et manquements de H2O AM, la société de gestion indiquait qu’elle avait “sécurisé” 250 millions d’euros pour rembourser les porteurs de parts.
Sans respecter l’égalité de ces derniers, puisqu’il était indiqué que les porteurs qui “[renonceraient] à toute action contre le Groupe H2O AM et les tierces parties en relation à ces investissements et à leur gestion” bénéficieraient “d’un paiement accéléré et majoré “.
Les autres devront attendre jusqu’à six ans pour être remboursés partiellement.
Entre la valorisation initiale d’octobre 2020 et celle de fin janvier 2025, compte tenu des remboursements de janvier 2023 et mars 2024, la moins-value latente sur les 7 side-pockets est de près de 1 milliard 319 millions d’euros d’après mes calculs.
La valeur résiduelle des side-pockets à fin mars 2025 est estimée à 92,689 millions d'euros.
Si H2O AM rembourse 250 millions d’euros et s'il n'y a pas d’autre remboursement, la perte totale pour les porteurs de parts de side-pockets pourrait donc être de 1 milliard 163 millions d'euros.
Le taux de recouvrement par rapport à la valorisation initiale des side-pockets serait de 29% (remboursement total de 479 124 121 €/1 642 330 150 €).
C'est le casse du siècle.
Pour les fonds liquides, voilà où on en est au jj mm 2025 (date de la VL des fonds liquides dont le nom se termine par « FCP », la dernière valeur liquidative mensuelle estimative des side-pockets étant en date du 31 mars 2025).
J'ai ajouté à la VL reconstituée le montant des distributions de janvier 2023 et de mars 2024.
En matière de décollecte, voilà où on en était au jj mm 2025.
En matière de performance, voilà où on en est au jj mm.
Les produits dont il a été question dans ma semaine Bluesky 18 peuvent être achetés en priorité chez votre libraire (pour les livres).
Sinon, si vous n’avez vraiment pas accès à un libraire, ou pour les livres en anglais, parfois plus difficiles à se procurer en librairie en France, vous pouvez cliquer sur les liens disséminés dans ce billet (informations sur le programme d’affiliation Amazon ici).
Vous pouvez suivre mon compte Bluesky ici, le compte X d’Alpha Beta Blog là et mon compte X en anglais là.
Je ne suis pas habilité à donner des conseils sur les produits de placement : ne me sollicitez pas pour cela car je ne vous répondrai pas.
Si vous avez des questions, consultez un conseiller en investissement financier. Un conseiller en investissement financier, c’est quelqu’un que vous payez pour qu’il.elle vous donne des conseils. Dans le jargon de MIF 2, seul le conseiller exclusivement payé par ses clients peut se déclarer indépendant.
Quelqu’un qui est payé par les fournisseurs de produits pour vous vendre lesdits produits, c’est un vendeur, pas un conseiller.
Comment trouver un conseiller en investissements financiers (CIF) indépendant au sens de MIF 2 ? C'est à peu près mission impossible : le site de l'ORIAS, qui est l'organisme auprès duquel s'enregistrent les CIF, ne permet pas de rechercher selon les critères "indépendant" ou "non-indépendant". Pas plus que ne le permettent les sites des 4 associations de CIF agréées par l'AMF.
C'est affligeant et scandaleux.
La charte éditoriale d’Alpha Beta Blog est consultable ici.
C’était ma semaine Bluesky 18 de 2025. Sayōnara. さようなら.
Zweig qualifie Buffett de “stock-intoxicated man”.
Buffett dit avoir gagné la “ovarian lottery”.
Zweig rappelle que ces investissements dans des valeurs petites et méconnues ont permis à l’action Berkshire Hathaway de délivrer une performance annuelle moyenne de 25,3% entre 1957 et 1968, à comparer avec 10,5% pour l’indice S&P 500. Dont je rappelle qu’il n’est pas directement investissable, et ne l’était pas non plus indirectement à cette époque.
“Pigs will sprout feathers.”
Qui, comme son nom de plume ne l’indique pas forcément, est français. Patrick Manoukian écrit également sous les noms de Paul Eyghar et Roy Braverman.
Il travaille aujourd’hui pour Le Canard Enchaîné.
0,75% par an sur les unités de compte en gestion libre, 0,85% sur le fonds euros, contrat assuré par Generali.
Magnifique incarnation de ce que Cory Doctorow appelle l’enshitiffication au sujet des grandes plateformes numériques. Quand elles ont atteint une taille qui le leur permet, ces dernières dégradent le service rendu à leurs clients. Ou le service se dégrade de lui-même car les ressources n’ont pas suivi la croissance. Le nombre de clients de BoursoBank a beaucoup crû et il est aujourd’hui bien plus difficile d’avoir un conseiller en ligne que dans le passé. Et quand on a une question un peu pointue, il faut parfois attendre très longtemps (je parle d’expérience, je suis client et il m’est arrivé de poser des questions un peu pointues). Tu veux qu’on te réponde rapidement, comme avant ? Paie 29 € par mois Enshitiffication, je vous dis. Ou merdification, si vous préférez la version française. Dernière heure (29 avril) : j’ai fait une demande sortant de l’ordinaire à BoursoBank hier et j’ai eu une réponse précise moins de 24 heures après. Tout espoir n’est donc pas perdu, même quand on n’est pas client de BoursoFirst.
Détenue par FWU AG, une holding allemande qui s’était déclarée surendettée auprès d’un tribunal de Munich le 19 juillet 2024.
Il arrive à être plus mauvais que le fonds euros du contrat Afer.
Antiphrase : 0,65%, ce n’est pas donné, même si c’est moins cher que les frais de gestion de BoursoVie.
J’ai en compté 109.
France Musique lui a rendu hommage dans quatre splendides émissions : “Georges Delerue, un centenaire en grande forme”.
Deux explications possibles : elles ont été pourries, comme l’année 2022, ou bien Ramify Essentials n’était pas lancé en 2022.
Oui, je sais, les dinosaures étaient herbivores. Vous voyez quand même ce que je veux dire.
“Grâce à l’inclusion de nouvelles sources de données”. Notez qu’il subsiste encore un trou dans la raquette à hauteur de 6% des encours.
Cette différence de performance entre les fonds traditionnels actions et les ETF actions me semble bien (trop) élevée. Mais qui suis-je pour émettre des réserves sur des calculs de l’ESMA ?
Encore quelques mois — jusqu’à fin 2025 — pour les gérants d’OPCVM. Et quelques longs mois supplémentaires pour les gérants sous mandat en compte-titre ordinaire.